GATA MAGAZINE
Funeral for the Flesh : The Post-Human Elegy of Ibis Hospital
Interview : @gata
The body is no longer sacred. It is a machine, a disposable relic, a hollow structure waiting to be cracked open. In the world of Paris-based artist @ibis_hospital, flesh is fused with metal, and decay is an aesthetic language. Their work exists in the space between the morgue and the museum, where industrial waste transforms into relics of a future long abandoned. Their work spans installations, set designs, paintings, and video, all forming a fragmented requiem for a society obsessed with consumption and artificial perfection.
Ibis Hospital constructs a brutalist form of beauty—mannequins suffocating in plastic resin, bones emerging from synthetic husks, surgical tools repurposed as ornaments of a collapsing age. Their compositions feel like evidence from an autopsy of civilization itself, a testament to the violence of overproduction, the quiet horror of a world obsessed with consumption.
Luxury, in their vision, is nothing more than a mausoleum. High fashion drapes itself in the imagery of death—bodies sculpted to fit impossible ideals, opulence as a form of embalming. In response, They mutilate perfection, warping it into something raw, something that refuses to be polished. Their latest experiments extend beyond sculpture—cinema, illustration—new mediums for a vision where humanity has already surrendered to its own artificiality.
This is not a protest. It is a prophecy. The human body will not be buried in the earth; it will be encased in resin, preserved in plastic, and displayed like a museum artifact of a species that no longer exists.
NASTY MAGAZINE
Weaving Art from the Remains of the Fallen
Interview : Annalisa Fabbrucci / @annalisa_fabbrucci
Editor : Maria Abramenko / @mariabramenko
« “My work is more of a mental projection.” »
OBSCURA.ZINE
Percer le voile : entretien avec l'hôpital Ibis
Interview : Alexia Hill / Obscura.zine
Au premier regard, voire au deuxième et troisième, c'est sanglant. C'est dérangeant. Ses mannequins sont dépecés, leurs entrailles étant constituées de tout, des munitions aux équipements médicaux, en passant par des couches de squelettes déformés et autres matériaux divers. Mais en y regardant de plus près, on comprend qu'Ibis, fondateur de la marque parisienne Ibis Hospital , s'attaque à la dureté de l'humanité et de l'industrie à travers des sculptures et des vêtements expérimentaux.
Des représentations brutales de l'anatomie corporelle, inspirées de la chirurgie, s'intègrent de manière peu orthodoxe, mais visuellement fascinante, aux métaux, cuirs, bandages et autres matériaux synthétiques, s'adressant peut-être à la société de consommation que nous avons construite. C'est ordonné et brutal.
Pour la plupart, c'est un cauchemar. Pour d'autres, c'est un purgatoire artistique, une observation cathartique du monde tel que nous le connaissons et le construisons depuis des générations. Nombre de ces œuvres évoquent visuellement Silent Hill, même si, conceptuellement, elles réduisent l'humanité à sa plus simple expression et la reconstruisent avec un regard technologique et pieux.
L'hôpital Ibis crée une variété d'œuvres, incluant des vêtements originaux, des sculptures, des masques, des décors, des vidéos, et bien plus encore. Nous avons eu la chance de discuter avec Roger de l'hôpital Ibis de ses dernières influences et de ses éditoriaux de mode, apportant un souffle nouveau et décalé à ses vêtements.
Alexia Hill : Depuis combien de temps créez-vous ces œuvres multi-supports ? Comment décririez-vous vos créations ?
Hôpital Ibis : J'ai commencé à réaliser ces sculptures en 2020, qualifiant les mannequins transformés de « crash tests ». Ce sont des expériences graphiques de collision de matériaux organiques avec les matériaux industriels qui nous entourent. Les pièces portables que je réalise depuis 2025 sont des prothèses esthétiques, également réalisées à partir de matériaux industriels.
AH : Qu’est-ce qui a initialement suscité votre créativité ou votre désir vers ce genre de style de travail dystopique, mécanique et anatomique ?
IH : Le christianisme a profondément influencé notre culture : nous vénérons un corps cloué sur une croix, instrument de torture. Cette glorification de la souffrance est ancrée dans notre imaginaire collectif. Dans l’église, les reliquaires préservent et exposent les reliques sacrées.
Il y a aussi les progrès médicaux liés à la guerre, notamment après la Première Guerre mondiale. La chirurgie reconstructrice a été développée pour reconstruire les corps détruits et a ouvert la voie à la chirurgie esthétique.
Dans la culture populaire, les films d’horreur et les jeux vidéo explorent les limites du corps.
AH : Quelles machines/technologies (ou toute autre forme de média) vous inspirent actuellement, et pourquoi ?
IH : Dans mon travail actuel, je m'inspire des univers agricoles et équestres. Je récupère des débris métalliques usés provenant d'outils destinés à labourer, broyer et arracher la terre – des fragments marqués par le temps, le travail et la rudesse. Je les associe au cuir, matière organique et sensuelle, pour composer des pièces hybrides, entre sculptures portatives et dispositifs de contrainte. Certaines rappellent les instruments de punition médiévaux, comme le pilori, où le corps est exposé, immobilisé, livré au regard – entre domination et rituel.
AH : Dans votre interview avec Nasty Mag , vous disiez : « Mon travail n'a rien de moraliste. À la manière d'une radiographie, je fais un constat extrême d'une violence tacite qui s'exerce sur notre morphologie. » Pouvez-vous développer ce point ?
IH : Tout ce qui s'attache à notre corps – iPhone, vêtements, vernis à ongles, fourchettes, couteaux, voitures… – est un prolongement à la fois pratique et esthétique de notre âme. Par le terme « radiographie », j'entends que mon travail ne cherche pas à porter un jugement moral sur la société de consommation ou notre époque. Il vise plutôt à souligner la transformation constante de notre corps. J'essaie d'amplifier ce qui est habituellement imperceptible, en rendant visible l'impact physique et symbolique de notre environnement sur notre morphologie.
AH : Vous avez créé de nombreuses sculptures et objets vestimentaires, comme des masques, des chaînes, et vous vous intéressez désormais aux harnais et aux vêtements expérimentaux. Vos récentes campagnes avec Angels Afternoon dans une morgue abandonnée à Paris sont magnifiques. Pouvez-vous me parler de l'expérience qui vous a permis de donner vie à ces photos ?
IH : Le tournage avec Oliver Leone était intense !
Dans une morgue glaciale des années 1950, Oliver a réalisé le film comme un metteur en scène de théâtre : chaque pose est soigneusement composée, chargée d'intention. J'ai eu la chance de travailler en équipe, l'énergie était concentrée. La morgue de l'hôpital psychiatrique de Ville-Évrard est un lieu froid, chargé d'histoire. C'était difficile pour les mannequins glaciales, mais elles ont vraiment tenu leurs promesses.
AH : En quoi le fait d'intégrer des personnes réelles à votre travail modifie-t-il l'interprétation, la vision, le récit et le ressenti des œuvres ? Est-ce que cela les modifie réellement ?
IH : Quand de vraies personnes portent ces pièces, elles cessent d'être des sculptures. Il ne s'agit plus de représenter un corps, mais de le confronter à lui. On voit comment la matière réagit au corps, comment il bouge, et ce qui ne fonctionne pas.
AH : Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans la création d'œuvres d'art plus portables, ou était-ce quelque chose qui vous a toujours intéressé ?
IH : J'aimerais combiner des sculptures et des sculptures portables dans un projet plus global, cinématographique ou expérimental, sur lequel je travaille en ce moment.
AH : Quel est le but derrière votre art et votre acte de création ?
IH : Je recherche un équilibre fragile entre beauté et horreur. Chaque création est un souvenir lié à une période de vie.
Dans cette quête d'équilibre, Roger a créé de nouveaux souvenirs pour ses spectateurs. Chaque œuvre pourrait être trouvée dans un vestige dystopique et abandonné de la civilisation ou dans une exposition prestigieuse. Inspirées par des scènes de Mortal Kombat, le corps du Christ dans les peintures baroques, de Junji Ito à Resident Evil, les œuvres dégagent une atmosphère à la fois troublante et fascinante. Elles invitent le spectateur à réfléchir à sa propre artificialité et à sa propre mortalité, tout en reflétant des codes culturels remontant aux origines de la religion.
Même si nous ne pouvons pas parler au nom de tout le monde, en regardant plus profondément que les cages thoraciques rouillées, les masques en cuir usés et les rouages de machines ensanglantés, nous pensons qu'il y aura encore plus à observer et à découvrir dans le monde ambiant que Tanguy continue d'explorer.
ENVOL 3IOI MAGAZINE
Weaving Art from the Remains of the Fallen
Interview: @ENVOL 3IOI
Your name (or nickname), Age and country
Ibis Hospiral, Paris (France)
Your artistic practice (medium used etc.)
I take marnequins and the materials that surround us to make crash test dolls necrotized by our compulsive industrial culture. Once designed, I stage the bodies in baroque settings to recreate religious scenes in my own way.
What is your relationship to Japanese culture ?
I like Japanese cinema without knowing much about it, but l've played a lot of video games, most recently the Dark Souls franchise. I really like the way Hidetaka Miyazaki borrows codes from European culture and turns them into his own. The Japanese imagination has no limits when it comes to designing monsters.
Which Japanese work marked your childhood ?
The Japanese works that made the biggest impressions on me as a teenager were Resident Boil 1, 4, Biobazard, The Eoil Witbin (later), Fatal Prame II.
Who are your favorite Juponese artists ond who influences you ?
In horror cinema: Hideo Nakata, The Ring. Dark Water.. The Grudge I, II, Tetsuo, Guinea Pig: Flower of Flesh and Blood. But also Rasbomon, The 7 Samurai, Zatoïcbi... Manga: Juinji Ito's drawings for Tomie, Full Metal Alchemist, Gunm, GTO.Animation: The Animatrix, Tek-konkinkstreet, Fiellsing.
I recendy discovered the world of Japanese dolls, in particular Etsuko Miura, whom I love for the scabrous poses she injects into her dolls. The sculptures I chose for the magazine refertothe «fatalities» in Mortal Kombat, when the characters get eclipsed.
What were your references for the work done for the magazine ?
The painting is a Pieta. Christ is bcheaded, and there is no resurrection. It refers to the persecution of Christians throughout the world.
This Hospital
Poush Manifesto
Love story
Curation : Gaya Goldmycer / A’topos
En katharsis
On plonge dans l’espace d’Ibis Hospital comme on plonge dans un rêve éveillé. On s’y enfonce comme dans une descente au cœur des entrailles de la terre, on s’y engloutit comme dans une descente au fond des abysses. Avec délices et appréhensions, on s’immerge dans cet espace comme au plus profond de nos émotions, de nos tourments, de nos désolations et de nos terreurs. Au plus profond de nos désirs aussi, de nos tentations ou de nos envies.
Alors, lentement, on s’approche de l’installation. Lentement, comme si l’on pressentait que quelque chose allait avoir lieu. Ou peut-être que ce quelque chose avait déjà lieu... Dans l’immédiat du regard, ce que l’on perçoit d’abord, c’est un dispositif délimité par une tenture, par le rideau marqueur du théâtral. Mais soudain, sans transition, on bascule là où l’artiste nous entraîne et nous propulse : sur une scène, celle d’un Baroque contemporain.
En précision, avec une logique du sensible, l’artiste crée son décor. Un décor vers lequel il nous attire doucement mais qui, brusquement, fait que l’on se retrouve posés là, sur l’échiquier d’un jeu en chiaroscuro, entre clarté et obscurité, entre ténèbres et lumière. Une lumière aussi blanche que les ténèbres sont noires. Une lumière brutale, directe et zénitale, qui tranche à vif, qui découpe, qui détache les volumes, et qui expose les formes en pleine lumière sur ces ténèbres qui les enchâssent.
En vibrant écho au Caravaggio, avec cette Love Story paradoxale, Ibis Hospital crée une atmosphère trouble et opaque, cristalline et nébuleuse, il accouple et synchronise des formes à des objets, il met en scène des corps et orchestre une pièce où la théâtralité agressive de la naissance et de la mort donne le rythme.
Et moi, dans un vertige à la Hitchcock, aspirée par le travail d’Ibis, je suis projetée dans une spirale sans fin, une spirale infernale sans arrêt possible, une spirale dans laquelle une avalanche d’images fantasmées, assaillie par une kyrielle de noms et de corps.
Des corps, donc, en double extase, comme celui de Sainte Thérèse transverbérée, des corps rapiécés, filés, tissés, torturés, comme ceux des Topiary Couples de Louise Bourgeois ou ceux des frères Chapman. Des corps étirés, douloureux et souffrants comme ceux de Francis Bacon et les corps-frontières entre érotisme et mort de Bellmer. Des corps hédonistes et objectivés de Pasolini et ceux de Tarantino qui subissent ou imposent l’insoutenable de la violence extrême. Et les corps portant béquilles, cordes, prothèses, des danseurs de Marie Chouinard qui les fait sauter, ramper, se figer pour mieux les faire danser à nouveau.
Avec détermination, Ibis récupère et s’empare d’objets, de baigneurs, de poupées celluloïd et de mannequins inanimés qu’il appareille, qu’il prothèse et découpe, qu’il morcelle et déchiquette, qu’il segmente pour mieux les rassembler : autrement. Dans un processus d’inversion, il met en place une déconstruction qui reconstruit et une réparation qui coupe, taille, visse, tranche, soude. Le tout dans une ambivalence absolue de la douleur qui soigne.
Une kyrielle d’éléments, aussi : pneu, chaînes, dents, Porte bouteille, scorpion, balles, crucifix, boite de protéines, bibelot, bracelet, moteur, crampons, scies et mini scies, Insignes, matériel d’orthodontie, boîte de vitamines, menottes, bracelet, sextoy, vis, métal alu, chaînes de moto, essuie-glaces, crampons, rollers, canif, bois, seringues, chaussures, masques, muselières, baskets, portes cierges, bagues, voiles, velours…
Œuvre d’art totale, ici l’artiste déploie sa vision du récit de l’Annonciation, de la Nativité, de la Cène, de la mort et de la Résurrection, il nous offre ses Mater dolorosa et ses Pietà et se questionne sur la transmission la sexualité, la filiation la procréation, la ressemblance l’altérité, l’identité l’étrangeté, la vie la mort, le normal l’anormal, l’humain l’inhumain, l’identité l’altérité, l’attraction et la répulsion. Avec en clin d’œil, une spéciale dédicace aux formes biomécaniques d’H.R Giger et à celles d’Akira et de Ghost in the Shell !
Œuvre d’art totale, cathrtique et burlesque, pieuse et déjantée, fantasmée et décentrée, ici l’artiste installe peinture, performance musique et sons, photos triptyques, assisted readymades, sculptures-assemblages et, sérieux comme le plaisir, avec Barnett Newman, il affirme que l’artiste était bien là : avant le philosophe.